Le rapport d’inspection est communicable sans y occulter les non-conformités constatées, en y occultant le nom des personnes physiques (sans précision sur le motif).
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 15 décembre 2020 au tribunal administratif de Melun et des mémoires, enregistrés les 30 janvier 2021, 29 septembre 2021 et 15 décembre 2021, M. Nicolas Marty demande au tribunal :
1°) d’annuler la décision du 3 décembre 2020 de la direction départementale de la protection des populations de Seine-et-Marne (DDPP 77) portant communication partielle du rapport d’inspection de l’établissement CEREEP pratiquant l’expérimentation animale en tant qu’elle occulte les intitulés de la grille d’inspection, les niveaux de conformité constatés pour chaque item, les commentaires entiers relatifs à ces non-conformités et le commentaire global en fin de rapport, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
2°) d’enjoindre la DDPP 77 de communiquer ce document dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Il soutient que :
– sa requête est recevable ;
– la décision est insuffisamment motivée ;
– les articles L. 311-1 et L. 311-6 du code des relations entre l’administration et les citoyens ont été violés, les occultations pratiquées ne rentrant pas dans le champ des exceptions posées par l’article L. 311-6 précité.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 janvier 2021 et 22 novembre 2021, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
– la requête est irrecevable, dès lors que la décision implicite de rejet ne sera effective qu’à compter du 3 février 2021 ;
– la DDPP 77 a rempli son obligation de motivation puisque M. Marty a été destinataire d’un courrier d’accompagnement lui explicitant les raisons des occultations réalisées sur le document ;
– le refus de communication des informations occultées se justifie par le caractère sensible du sujet de la condition animale, des tentatives d’actes malveillants au sein de l’abattoir de Meaux. La divulgation de ces informations ferait apparaître le comportement de la personne morale et serait de nature à lui causer préjudice.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code des relations entre le public et l’administration ; – le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. xxx, vice-président, pour statuer sur les litiges relevant de l’article R. 222-13 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique : – le rapport de M. xxx,
– les conclusions de Mme xxx, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le 7 mai 2020, M. Nicolas Marty a demandé au préfet de Seine-et-Marne (direction départementale de la protection des populations) communication des copies numériques du dernier rapport d’inspection de chacun des établissements pratiquant l’expérimentation animale sur le territoire du département. En l’absence de réponse de sa part, il a saisi, le 27 juillet 2020, la commission d’accès aux documents administratifs (CADA), qui a rendu, le 29 octobre 2020, un avis favorable sous réserve, à la communication des documents sollicités. Le 3 décembre 2020, le préfet de Seine-et-Marne a adressé à M. Marty un rapport d’inspection de la DDPP 77 concernant l’établissement CEREEP sur lequel des occultations ont été réalisées. Par courrier du même jour, M. Marty a formé un recours gracieux à l’encontre de la décision de la DDPP 77. Par la présente requête, M. Marty doit être regardé comme demandant l’annulation de la décision du 3 décembre 2020 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a procédé à une communication seulement partielle du rapport de l’établissement CEREEP réalisée par la direction départementale des populations de Seine-et-Marne le 20 décembre 2016 en occultant certains passages des pages 2 à 4 dudit rapport.
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :
2. Le préfet de Seine-et-Marne soutient que la requête de M. Marty est prématurée dès lors qu’elle a été introduite le 15 décembre 2020 alors que la décision implicite de rejet de son recours gracieux n’était effective qu’à compter du 3 février 2021. Toutefois, le requérant était en droit d’attaquer la décision du 3 décembre 2020 sans attendre le résultat de son recours gracieux dès lors que cette décision faisait suite au recours préalable obligatoire introduit le 27 juillet 2020 auprès de la CADA et au demeurant à l’avis de cette commission rendu le 29 octobre 2020 dès lors qu’à la date du présent jugement la décision implicite est née. Par suite, le préfet n’est pas fondé à soutenir que la requête serait prématurée. Dès lors, la fin de non-recevoir sera écartée.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
3. Aux termes de l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration dispose que : « Sont considérés comme documents administratifs, (…), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. (…) ». Aux termes de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ». Aux termes de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration : « Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée (…) ; / 2° portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ; / 3° Faisant apparaître le comportement d’une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice ». L’article L. 311-7 du même code dispose : « Lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L. 311-5 et L. 311-6 mais qu’il est possible d’occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions ».
4. Pour refuser la communication des éléments occultés, le préfet de Seine-et-Marne invoque les dispositions de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, lequel autorise, en son 3°, l’occultation possible des mentions portant divulgation du comportement d’une personne dès lors que cette divulgation serait de nature à lui porter préjudice et s’appuie, à cet égard, sur le caractère sensible du sujet de la condition animale et l’existence antérieure de plusieurs tentatives d’actes de malveillance dirigés contre l’abattoir de Meaux déjouées par les services de police. Toutefois, d’une part, après avoir pris connaissance dy rapport non occulté, il n’est nullement démontré que la communication des informations demandées aurait pour effet de révéler le comportement d’une personne alors que, dans le rapport communiqué à M. Marty, ont été occultés à bon droit les noms des personnes physiques exerçant au sein de l’établissement ou associées à celui-ci. D’autre part, le préfet de Seine-et-Marne ne fait état d’aucune menace de manière suffisamment circonstanciée concernant le CEREEP et aucun élément probant n’est versé au dossier de nature à en attester l’existence. Dans ces conditions, le préfet de Seine-et-Marne n’est pas fondé à refuser à M. Marty communication des informations occultées dès lors que celles-ci ne sont pas de nature à permettre l’identification d’une personne physique.
5. Il résulte de ce qui précède que M. Marty est fondé à soutenir que la décision de la DDPP77 refusant de lui faire communication des pages 2 à 4 non occultées du rapport d’inspection du 20 décembre 2016 de l’établissement CEREEP est illégale et à en demander pour ce motif l’annulation, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens de la requête.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
6. Aux termes de l’article L. 911-2 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d’office l’intervention de cette nouvelle décision ».
7. Eu égard à ses motifs, le présent jugement implique qu’il soit enjoint à la DDPP 77 de communiquer à M. Marty les pages 2 à 4 du rapport d’inspection de l’établissement CEREEP, sans occultation. En revanche, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte.
D E C I D E :
Article 1er : La décision par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a communiqué le rapport d’inspection du 20 décembre 2016 de l’établissement CEREEP est annulé en tant qu’elle occulte les pages 2 à 4.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de communiquer à M. Marty les pages 2 à 4 du rapport d’inspection du 20 décembre 2016 de l’établissement CEREEP.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Nicolas Marty et au ministre de l’intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2022.
Vu la procédure suivante :
M. B A a demandé au tribunal administratif de Melun, d’une part, d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 3 décembre 2020 de la direction départementale de la protection des populations de Seine-et-Marne portant communication partielle du rapport d’inspection de l’établissement CEREEP pratiquant l’expérimentation animale en tant qu’elle occulte les intitulés de la grille d’inspection, les niveaux de conformité constatés pour chaque item, les commentaires entiers relatifs à ces non-conformités et le commentaire global en fin de rapport ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et, d’autre part, de lui enjoindre, dans un délai de quinze jours et sous astreinte, de communiquer ce rapport. Par un jugement n° 2010355 du 12 janvier 2022, le tribunal administratif de Melun a annulé cette décision en tant qu’elle occulte les pages 2 à 4 du rapport d’inspection du 20 décembre 2016 de l’établissement CEREEP, a enjoint au préfet de Seine-et-Marne de communiquer à M. A les pages 2 à 4 du rapport d’inspection et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Par un pourvoi sommaire, enregistré le 10 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la demande de M. A.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Le premier alinéa de l’article R. 822-5 du code de justice administrative dispose que : » En cas de désistement avant l’admission du pourvoi, ou si le requérant est réputé s’être désisté en application de l’article R. 611-22, le président de la chambre donne acte du désistement par ordonnance « . Cette procédure ne nécessite ni instruction contradictoire préalable, ni audience publique.
2. Aux termes de l’article R. 611-22 du code de justice administrative : » Lorsque la requête ou le recours mentionne l’intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. / Si ce délai n’est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s’être désisté à la date d’expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d’Etat donne acte de ce désistement « .
3. Le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, dans son pourvoi sommaire, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 10 mars 2022, a exprimé l’intention de produire un mémoire complémentaire. A la date de la présente ordonnance, le délai imparti par les dispositions précitées est expiré. Aucun mémoire complémentaire n’a été produit avant l’expiration de ce délai. Ainsi, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation doit être réputé s’être désisté de son pourvoi. Il y a lieu, par suite, de donner acte de ce désistement d’instance.
ORDONNE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement d’instance du ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Copie en sera adressée à M. B A.
Fait à Paris, le 2 décembre 2022