Résumé non technique reproduit depuis ALURES
("EC NTS/RA identifier" : NTS-FR-417318)
Objectifs et bénéfices escomptés du projet
Décrire les objectifs du projet.
Plus de la moitié des espèces connues de poissons vivent en zone côtière ou estuarienne. Les nourriceries en milieu côtier dont dépendent l’accomplissement du cycle de vie et le renouvellement des populations sont, de ce fait, considérées comme des habitats essentiels. De plus, l’élevage des poissons s’effectue également principalement en zone côtière. Or, il est bien établi que les zones côtières et estuariennes sont les plus vulnérables face aux pressions combinées du changement climatique et notamment au réchauffement, à l’acidification et aux épisodes de désoxygénation des océans. Ainsi, la santé des poissons (sauvages ou d’élevage) présents dans ces zones, et notamment leurs capacités à croitre et à se défendre contre les pathologies dépendront de leur capacité à faire face à la combinaison de ces contraintes environnementales en milieu côtier. Les questions abordées dans le projet sont : 1) L’exposition à long terme de juvéniles de bar à des conditions environnementales (température, acidification, oxygénation) prédites à l’horizon 2100 va-t-elle modifier des paramètres physiologiques associés à la santé du poisson ? et 2) ces effets vont-ils modifier leurs performances de croissance, de survie, leur maturation sexuelle et leur résistance à une exposition à des pathogènes ? Ce projet sera mené dans 2 établissements utilisateurs (EU) qui coupleront leurs expertises.
Quels sont les bénéfices susceptibles de découler de ce projet?
A court terme, les différentes analyses de performances et les caractérisations physiologiques réalisées au cours des différentes phases d’exposition donneront une vision globale de la capacité des poissons à faire face à une combinaison de facteurs environnementaux. A moyen terme, les données générées contribueront à déterminer des marqueurs d’exposition à ces différents facteurs environnementaux. Plus globalement, ce projet s’inscrit dans la volonté de mieux comprendre et prédire les interactions des poissons pêchés ou élevés avec leur environnement dans l’écosystème côtier et ainsi élaborer des politiques solides en matière de gestion des pêches et de l’aquaculture dans un contexte de changement global.
Nuisances prévues
À quelles procédures les animaux seront-ils soumis en règle générale?
De 3 à 5 mois, 50 poissons par bassin et par mois, aléatoirement pêchés, seront pesés (sous anesthésie, durée de la pesée par poisson: 1 minute). A partir du cinquième mois, tous les poissons (n=3400) seront pesés mensuellement après avoir été marqués individuellement par injection d’une puce électronique intramusculaire (sous anesthésie). Ces interventions nécessiteront la pêche des poissons. Afin de limiter le stress lié à la manipulation, les poissons pêchés seront sédatés dans leur bac puis anesthésiés. L’intervention de micro-injection n’excèdera pas 5 minutes (pêche, anesthésie, et injection comprises). La durée par poisson d’une intervention de pesée n’excèdera pas non plus 5 minutes. Des transferts entre bassins seront également effectués au cours du projet. Ces transferts se feront sous anesthésie en utilisant des bacs de transferts transitoires opaques et oxygénés. Les étapes de transfert n’excèderont pas 15 minutes. Les conditions de température et d’acidification, prises indépendamment les unes des autres ou en interaction représentent une nuisance légère durant les 15 premiers mois. A 16 mois, la moitié des poissons survivants (non mis à mort pour analyse post mortem) seront placés en niveau d’oxygénation de l’eau à 60% pendant 3 semaines. Nous supposons, sur la base d’études précédentes, que cette exposition représente une nuisance légère dans le contexte de l’élevage (absence de prédation; autres facteurs environnementaux contrôlés). Tous les éléments décrits précédemment seront réalisés dans l’EU n°1. Au début du 18ème mois, l’exposition expérimentale à des pathogènes, nécessaire pour évaluer le statut immunitaire des poissons, constitue une nuisance sévère. L’exposition durera entre 2 et 6 semaines. L’EU n°1 aura en charge un pathogène bactérien et l’EU n°2, vers qui sera transférée une partie des animaux, une bactérie et un virus. Les animaux seront alimentés pendant toute la durée du projet avec un aliment commercial d’élevage et seront rationnés au niveau alimentaire à 60% de ce qui est distribué en aquaculture afin de mieux calquer les réalités écologiques. Ce rationnement ne représente pas une nuisance car il permet aux poissons de croitre à un rythme moindre comparé aux conditions aquacoles standards où l’on vise à diminuer les durées d’élevage.
Quels sont les effets/effets indésirables prévus sur les animaux et la durée de ces effets?
Un stress léger pourra intervenir lors de la manipulation des poissons pour estimer la prise de poids mensuelle. A raison d’1mn de stress par poisson pour chaque pesée, la durée de ce stress léger est estimée à 16 mn sur l’ensemble du projet ( x 16 mesures biométriques). Un stress léger pourra aussi intervenir lors du transfert des poissons dans les différents bassins ; au début de l’expérimentation et au cours des étapes d’hypoxie et des épreuves infectieuses avec les différents pathogènes. Pour les transferts intra-structure, la durée du transfert sous anesthésie n’excédera pas 5 minutes. Les lots de poissons qui seront exposés aux prétests et challenges avec les pathogènes viraux et de type vibrio seront transférés au sein du site, dans une structure située à 200 mètres. Le transfert durera 15 minutes et se fera sous anesthésie. Du fait de l’ anesthésie, le stress associé aux transferts est léger; de plus, les caractéristiques physicochimiques (températures, pH, salinité) de l’eau des bacs avant et après transferts seront identiques. Les poissons seront alimentés 24h après transfert, délai nécessaire pour leur acclimatation à leur nouveau bassin. Les changements des caractéristiques physicochimiques de l’eau des bassins ne pourront s’effectuer que 48h après transfert. Les conditions abiotiques (température, pH, niveau d’oxygénation) prises indépendamment les unes des autres constituent des stress légers (18 mois) pour les facteurs température et pH ou modérés (3 semaines) pour l’hypoxie modérée. La contrainte hypoxique peut se traduire par une diminution de l’activité de nage des poissons traduisant une dépression métabolique. La durée de l’hypoxie (3 semaines) limite toutefois le risque de forte sévérité ; la mortalité devant être évitée lors de cette étape d’hypoxie, dans le cas contraire, le niveau d’hypoxie pourra être adapté. Un stress léger interviendra au moment des prises de sang (1mn par poisson). Les épreuves infectieuses virale et bactérienne constituent des stress très sévères puisqu’ils induisent l’apparition de signes cliniques (déformation de l’oeil, changement de couleur de robe, lésions cutanées, nage anormale, léthargie, déséquilibre, anorexie) et une mortalité sur les poissons (% de mortalité variable dans les bassins en fonction de la résistance des poissons mais pouvant aller jusqu’à 90%).
Justifier le sort prévu des animaux à l’issue de la procédure.
A l’issue des challenges aux pathogènes, tous les poissons survivants seront mis à mort pour prélèvement et analyse de paramètres immunologiques
Application de la règle des "3R"
1. Remplacement
Cette étude vise à étudier l’effet de facteurs environnementaux (température, pH, oxygénation) sur l’état de santé du poisson. La caractérisation de ces effets se fait à l’échelle de l’organisme entier. Les méthodes de substitution telles que la culture cellulaire par exemple ne permettent pas de répondre à un questionnement physiologique dépendant de réponses complexes de différents tissus. Le maximum d’analyses sera réalisé au niveau de prélèvements sanguins, ce qui permettra dans le futur de trouver des marqueurs de l’état de santé du poisson. Les épreuves infectieuses sont à ce jour la seule possibilité d’évaluer et de prédire les capacités de résistance des poissons face à des agents pathogènes prévalents dans le milieu environnant (contexte écologique et aquacole); cette capacité de résistance dépend de nombreux facteurs, en particulier de différentes composantes du système immunitaire dans divers organes mais également (par exemple) du statut énergétique du poisson ou encore de son microbiote. Les données obtenues au cours du projet pourront permettre de développer dans le futur des marqueurs (au niveau sanguin et tissulaire) prédictifs des capacités de résistance des poissons face aux pathogènes.
2. Réduction
Le bar européen juvénile est un animal vivant en groupe et le nombre d’animaux par bac répond tout d’abord à cette contrainte. Le nombre de poissons tient donc compte de la densité minimale d’animaux requise pour permettre aux animaux d’exprimer les meilleurs répertoires physiologiques et comportementaux possibles, et permet donc de répondre à leur bien-être. De plus, le nombre de poissons a été réduit à son minimum et défini en fonction du nombre nécessaire pour réaliser la cinétique de prélèvements (à 6, 9 et 18 mois post-éclosion) ainsi que les épreuves infectieuses expérimentales. Ce nombre tient également compte des taux de mortalités communément observés au cours des 18 premiers mois de vie juvénile. Le nombre de prélèvements prévus a été déterminé en fonction du seuil de la pertinence scientifique et statistique. De même, le nombre de poissons prévus pour les épreuves infectieuses permet de réaliser une analyse statistique de résistance.
3. Raffinement
Pour la phase 2, les mesures de Raffinement viseront à assurer des conditions optimales d’hébergement, à savoir, un volume d’eau adapté en circuit ouvert avec une oxygénation suffisante en fonction de la biomasse, un rythme jour/nuit naturel, la présence de suffisamment de congénères pour exprimer un répertoire comportemental riche, une distribution d’aliment adaptée. Une importance particulière sera donnée à l’observation des animaux, 1 fois/jour minimum (plus pour suivre l’évolution de poissons présentant des signes de stress). Les infections expérimentales bactériennes ou virales peuvent provoquer une mort rapide sans qu’il soit possible d’observer des symptômes cliniques. Toutefois, pour éviter toute souffrance, les animaux présentant un comportement de nage anormal marqué avec des périodes sur le flanc / sur le ventre et/ou des signes de détresse respiratoire avancée et/ou des hémorragies faciales / au niveau des flancs et/ou des signes nerveux seront mis à mort de manière compassionnelle avec une surdose d’anesthésique.
Expliquer le choix des espèces et les stades de développement y afférents.
Le bar est une espèce de poisson marin d’intérêts halieutique, aquacole et écologique. La communauté scientifique s’intéresse à mieux prédire l’impact du changement global sur cette espèce. Les poissons sont des juvéniles (non matures sexuellement). Agés d’environ 3 mois, ils pèseront en moyenne 3 grammes au début de l’expérimentation. Ce stade de développement est particulièrement pertinent pour notre étude puisque c’est à ce stade de vie que les poissons regagnent les nourriceries côtières dans la nature et qu’ils sont donc plus exposés aux contraintes environnementales associées au changement global.