Résumé non technique reproduit depuis ALURES
("EC NTS/RA identifier" : NTS-FR-698265)
Objectifs et bénéfices escomptés du projet
Décrire les objectifs du projet.
Écouter dans des situations réalistes est un processus actif qui mobilise les facultés perceptives et cognitives, conférant au discours du sens, à la musique sa capacité à susciter des émotions et aux sons de l’environnement de la pertinence. Grâce à l’écoute, les humains et les autres animaux naviguent à travers des scènes acoustiques complexes, séparent des sources sonores mélangées, désambiguïsent des messages et évaluent leur pertinence comportementale. Ces prouesses remarquables sont actuellement au-delà de notre compréhension et dépassent de loin les capacités des systèmes d’ingénierie audio les plus sophistiqués. L’objectif du projet de recherche est d’étudier expérimentalement une approche radicalement nouvelle de l’audition, où l’écoute active émerge d’une profonde interaction entre les processus sensoriels adaptatifs et la cognition décisionnelle. Notre objectif est d’intégrer la fonction cognitive comme faisant partie intégrante du traitement sensoriel, ce qui se prête à une investigation neurophysiologique. Plus précisément, nous allons explorer le postulat que la perception active est médiée par un processus d’adaptation rapide au niveau du neurone mais aussi des populations de neurones dans leur ensemble ; ce phénomène est ici appelé plasticité rapide. À la confluence du traitement sensoriel et cognitif, la plasticité rapide se retrouve à tous les niveaux du système auditif, de la cochlée jusqu’au cortex auditif et préfrontal.
Quels sont les bénéfices susceptibles de découler de ce projet?
Le projet s’appuie sur les travaux des chercheurs en charge du protocole réalisés lors de la dernière décennie sur la physiologie et la modélisation informatique de ces phénomènes. Ces efforts ont abouti à la découverte de plasticité rapide dans le cortex auditif, au niveau du neurone unique et de populations de neurones. Ils ont aussi conduit à l’élaboration d’un modèle neuromimétique de traitement auditif qui ont mené à des percées technologiques et à des applications concrètes. Ils ont enfin permis d’utiliser une technologie de neuroimagerie large-champ chez le furet. S’appuyant sur ces domaines très complémentaires et plusieurs innovations techniques (reconstruction de stimulus à partir d’enregistrements de neurones à grande échelle chez les animaux réalisant une tâche de comportement, détection d’événements corticaux de réactivations mnésiques), nous espérons promouvoir une vision nouvelle de la perception auditive et de la cognition. Cela contribuera également de manière significative à des avancées significatives dans le domaine du traitement du signal pour les prothèses auditives cliniques, étant donné que de nombreuses limitations actuelles ne sont pas technologiques, mais plutôt conceptuelles.
Nuisances prévues
À quelles procédures les animaux seront-ils soumis en règle générale?
1. Tous les animaux sont équipés d’un implant crânien lors d’une première chirurgie qui se fait sous anesthésie et analgésie (durée 4-6h). Cet implant permet ensuite de réaliser des enregistrements neuraux en électrophysiologie ou en neuroimagerie fonctionnelle par ultrasons (procédures répétées autour d’une cinquantaine de fois en moyenne chez animal vigile, entre 3 et 5 fois par semaine, durée moyenne d’enregistrement 3h). A la fin de la période d’enregistrement une partie des animaux sera euthanasiée (sous anesthésie/analgésie), à la suite de quoi différents prélèvements seront réalisés post-mortem. Pour l’autre partie des animaux, l’implant crânien sera retiré lors d’une chirurgie sous anesthésie et analgésie (durée 3h) pour permettre un replacement après un temps de récupération adapté. 2. Lors du suivi postopératoire, l’animal est en hébergement individuel maximum 48h en infirmerie (cage d’hébergement séparé qui permet de maintenir le contact visuel, olfactif et auditif avec les autres animaux, le personnel et la routine de l’animalerie) afin de s’assurer que d’autres furets ne s’accaparent les aliments mous mis à disposition ainsi que pour pouvoir observer si la prise de nourriture est faite. 3. Le contrôle hydrique sous entraînement sont placés en contrôle hydrique à partir de dimanche après-midi après pesée jusqu’au vendredi (120h=5j=0.7 semaine). Une pause de 10 jours est ménagée tous les 2 mois.
Quels sont les effets/effets indésirables prévus sur les animaux et la durée de ces effets?
La procédure chirurgicale se faisant sous anesthésie, un risque anesthésique est présent, avec une présence de douleur post-opératoire possible mais prise en charge par une médicamentation analgésique. Au long-terme, il existe aussi un risque infectieux. Par ailleurs, certains enregistrements neuraux se font chez l’animal en situation de contention. La contention des animaux est nécessaire dans le cadre des enregistrements et pourra être génératrice de stress et d’inconfort pour l’animal. De plus, le comportement sera motivé par une privation hydrique qui pourra entraîner une sensation de soif de courte durée chez l’animal.
Justifier le sort prévu des animaux à l’issue de la procédure.
L’euthanasie est nécessaire pour réaliser une analyse post-mortem des tissus cérébraux. Cette méthode n’est utilisée que pour les animaux dont la localisation des enregistrements électrophysiologiques par histologie post-mortem est nécessaire (n=15). Pour l’ensemble des autres animaux (n=15), nous retirons l’implant crânien à la fin de l’expérimentation quand cela est possible, afin qu’ils puissent être réhabilités par des organismes compétents.
Application de la règle des "3R"
1. Remplacement
Afin de pouvoir comprendre le traitement de l’information sensoriel dans les cortex auditifs, visuels et frontaux, il est nécessaire d’avoir recours à des animaux vivants pour pouvoir enregistrer l’activité neurale, que ce soit de neurones uniques en électrophysiologie ou les flux hémodynamiques en imagerie large-champ. Ce type d’enregistrement n’est pas réalisable chez des êtres humains. Par ailleurs, le furet constitue un animal modèle nécessaire à la compréhension de la perception auditive dans un contexte de prise de décision. En effet, il est capable d’apprendre des tâches complexes et de percevoir des sons dans une gamme auditive similaire à celle de l’être humain. Son cerveau à cortex plissé permet aussi d’étudier le rôle fonctionnel des plis corticaux, ce qui n’est pas possible chez le rongeur ou primate à cortex licencéphale.
2. Réduction
Le type d’expérimentation que nous réalisons permet de réaliser de nombreux enregistrements sur un nombre réduit d’animaux. Ici, 30 animaux seront utilisés : 15 pour les expériences avec histologie et 15 pour les expériences sans histologie et replacement. Les effets seront quantifiés par des méthodes paramétriques et des méthodes non-paramétriques.
3. Raffinement
L’état de santé des animaux est suivi en permanence, en collaboration avec un vétérinaire. Les animaux sont hébergés dans des cages enrichies en jouets et tunnels divers et régulièrement mis tous ensemble dans une aire de jeu. Durant les week-ends, les animaux ne doivent pas effectuer de tâche comportementale. Le comportement est motivé par un contrôle hydrique, raison pour laquelle nous avons établi une grille de score nous permettant de suivre au plus près le bien-être et l’état général des animaux. Le protocole de chirurgie inclut l’administration d’anti-inflammatoire et d’analgésique en pré- et post-opératoire. Pour accompagner ces procédures, nous avons mis en place des points limites adaptés, ainsi qu’un arbre décisionnel pour terminer toute souffrance observée. Sur le plan expérimental, un effort constant nous pousse vers la pose de systèmes d’enregistrements chroniques chez les animaux pour obtenir des sessions d’enregistrements plus courtes. Enfin nous explantons un grand nombre d’animaux, quand cela est possible, à la fin de l’expérimentation, afin de les réhabiliter.
Expliquer le choix des espèces et les stades de développement y afférents.
Les furets apprennent rapidement une tâche ; ils ont par ailleurs une large gamme auditive, similaire à celle de l’homme. Leur cerveau est assez grand pour utiliser des électrodes avec 200 contacts. De plus leur cortex est convolué ; ces plis corticaux ne sont pas présents chez le rongeur à l’inverse de nombreux primates. Le furet permet d’étudier un putatif rôle fonctionnel de ces plis. Les individus femelles sont préférés en raison de leur petite taille. Les animaux ont entre 6 mois et 1 an quand ils arrivent au laboratoire, âge auquel ils sont adultes ; ce stade est choisi car le développement du cerveau est alors terminé.