Résumé non technique reproduit depuis ALURES
("EC NTS/RA identifier" : NTS-FR-982950)
Objectifs et bénéfices escomptés du projet
Décrire les objectifs du projet.
Le tabagisme est la première cause de mortalité évitable au monde (OMS). L’usage de la nicotine peut entraîner une dépendance par le biais de processus complexes qui sont régulés à la fois par ses effets récompensants et par ses effets aversifs. L’effet primaire de la nicotine sur le système nerveux central est d’activer les récepteurs de la nicotine, modifiant ainsi l’activité électrique des neurones. Ces récepteurs sont normalement activés par une molécule fabriquée par le cerveau : l’acétylcholine. Identifier et comprendre le rôle des différents récepteurs nicotiniques et des voies neuronales dans la transmission des effets récompensants et aversifs de la nicotine est crucial à la compréhension des mécanismes de la dépendance au tabac et au développement de nouvelles thérapies. Nous nous focaliserons sur deux voies distinctes. Premièrement, la voie de la résompense, qui fabrique de la dopamine et est impliquée dans les phénomènes de renforcement aux drogues et de motivation, mais aussi dans les effets anxiogènes de la nicotine. Nous étudierons cette voie dans le contexte du lien entre addiction à la nicotine et interactions sociales. Deuxièmement, nous étudierons une voie qui joue un rôle clé dans l’aversion à la nicotine et également un rôle de frein sur les proprétés récompensantes de la drogue. Le lien fonctionnel entre ces deux voies reste à élucider, et c’est l’objectif de ce projet.
Quels sont les bénéfices susceptibles de découler de ce projet?
La dépendance à la nicotine demeure un problème majeur de santé publique dans le monde entier, et les traitements pour les fumeurs qui veulent arrêter de fumer ne restent que marginalement efficaces. L’usage de la nicotine peut entraîner une dépendance par le biais de processus complexes qui sont régulés à la fois par ses effets récompensants et par ses effets aversifs. En fait, les humains comme les animaux de laboratoire régulent leur consommation de nicotine lorsqu’ils s’auto-administrent de la nicotine, en jouant sur cette balance renforcement/aversion. Identifier et comprendre le rôle spécifique de certains types de récepteurs nicotiniques et de certaines voies neuronales dans la transmission des effets récompensants et aversifs de la nicotine est crucial à la compréhension des mécanismes de la dépendance au tabac et au développement de nouvelles thérapies.
Nuisances prévues
À quelles procédures les animaux seront-ils soumis en règle générale?
1) Chirurgies réalisées sous anesthésie générale (durée 40 min), deux fois par animal maximum, avec 1 semaine de récupération entre deux chirurgies. 2) Prélèvement du cerveau : procédure réalisée sous anesthésie profonde (durée 10 minutes) une seule fois par animal. 3) Biopsie de la queue pour génotypage, réalisée une seule fois par animal. Durée 30 secondes. 4) Enregistrements des signaux électriques du cerveau in vivo (durée 5h) : procédure chirurgicale réalisée sous anesthésie profonde, une seule fois par animal. 5) tests comportementaux (consommation de nicotine, exploration, locomotion, tests d’anxiété, et interactions sociales), dont la réalisation s’étend de 20 à 40 jours, avec 1 jour de repos minimum entre deux tests. 6) Injections intraveineuse de composés : procédure réalisée sous anesthésie profonde, une fois par animal (durée 5 h).
Quels sont les effets/effets indésirables prévus sur les animaux et la durée de ces effets?
Douleurs post opératoire minorées par l’emploi d’antalgiques, s’accompagnant d’une perte de poids durant environ 48 h. Des signes d’infection autour de la zone de chirurgie peuvent apparaître. Pour le test de consommation de nicotine, les animaux sont isolés, ce qui peut les stresser. Douleur légère de courte durée pour les animaux génotypés qui subissent une biopsie de la queue.
Justifier le sort prévu des animaux à l’issue de la procédure.
A l’issue des procédures, tous les animaux seront euthanasiés, afin de récupérer les cerveaux pour analyses histologiques et moléculaires, ou bien pour vérifier les sites d’injection.
Application de la règle des "3R"
1. Remplacement
La mise en place de l’addiction à la nicotine est un phénomène complexe qui fait intervenir plusieurs régions du cerveau et qui entraine des remaniements cérébraux à long terme. Comprendre les mécanismes impliqués dans l’apparition, le maintien et la rechute de ce trouble psychiatrique nécessite de travailler chez l’animal. En effet, les cultures de cellules ne permettent pas de reproduire la complexité des circuits neuronaux qui régissent ces différentes étapes de l’addiction. Ces circuits neuronaux doivent être étudiés soit sur organe prélevé (expériences d’électrophysiologie patch clamp) soit sur animal intact pour préserver les circuits (électrophysiologie in vivo, photométrie fibrée, optogénétique…). Par ailleurs ces expériences de physiologie sont mises au regard des comportements addictifs observés chez les animaux, comportements qui ne peuvent aujourd’hui être modélisés in silico. Par ailleurs, nous étudions l’impact de la nicotine sur les interactions sociales entre souris, et les circuits impliqués, ce qui ne peut être réalisé que chez un animal avec ses congénères.
2. Réduction
Le nombre d’animaux, pour ce projet, est déterminé sur la base d’une littérature vaste et robuste dans des domaines similaires mais aussi sur notre expertise personnelle en physiologie et analyses comportementales. Afin de minimiser l’utilisation de souris, nous nous imposerons un cahier des charges strict. Pour ce faire, les procédures ont été pensées pour qu’une même souris puisse passer dans un nombre maximum d’expériences (notamment les tests comportementaux) afin de Réduire l’utilisation de nouveaux animaux pour chaque expérimentation. Nous utiliserons dans la mesure du possible tant les souris mâles que femelles, afin d’utiliser toutes les souris issues d’une même portée. Les groupes d’animaux testés seront définis de manière à Réduire le nombre d’animaux au minimum nécessaire pour obtenir des résultats robustes, dans les différentes conditions.
3. Raffinement
Le bien-être des souris est conditionné par la mise en place de protocoles visant à Réduire les éventuelles souffrances animales (administration d’analgésique lors de chirurgies ou après agression entre congénères, utilisation d’anesthésique local au niveau des oreilles pour les injections stéréotaxiques). Un tapis chauffant est utilisé lors des chirurgies pour maintenir la température coroporelle constante. L’anxiété des animaux est réduite par un maintien en groupe et par une manipulation régulière. Les jours suivant l’opération chirurgicale, les animaux sont surveillés quotidiennement afin de détecter d’éventuelles infections post-chirurgicales ou autres complications. L’objectif est de prévenir toute douleur ou détresse. Les signes de douleur contrôlés sont : apparence générale, alimentation, consommation d’eau, irritation au site de la chirurgie, vocalisation, tremblements, léthargie, agressivité etc…. En cas de signes de douleur (isolement, immobilité, perte de poids de plus de 10%, blessures contaminées, hyper-réactivité quand on le prend, posture, poils hérissés) persistant au-delà de 12h après la chirurgie, nous procéderons à une nouvelle injection d’antalgique et potentiellement à une application locale de pomade antibiotique sur une potentielle plaie infectée. Si les points limite persistent, une grille d’évaluation sera utilisée pour déterminer si l’animal doit continuer à être traité avec des analgésiques, ou euthanasié. Dans le cas où les animaux doivent être isolés (en cas de blessure ou pour enregistrement de consommation de boisson), un abri en carton ainsi que du tissu papier seront déposés dans les cages de manière à enrichir l’environnement des animaux et leur permettre de fabriquer un nid.
Expliquer le choix des espèces et les stades de développement y afférents.
D’un point de vue anatomique et fonctionnel, les systèmes dopaminergiques et cholinergiques sont bien conservés chez l’ensemble des mammifères et en particulier chez les rongeurs. Plus particulièrement, les afférences cholinergiques sont organisées de manières similaires que chez l’homme. Ce n’est pas le cas chez les invertébrés, les poissons ou les oiseaux. De plus, la génétique de la souris offre des outils de modulation des réseaux neuronaux, difficilement accessibles chez d’autres modèles animaux. L’organisation anatomique des modèles d’invertébrés et poissons est trop différente pour qu’ils puissent être utilisés pour comprendre la modulation cholinergique et dopaminergique. Finalement la souris étant un mammifère social qui vit en groupe, c’est un modèle pratique pour pouvoir étudier le comportement social en groupe chez les animaux sociaux. Des modèles d’autres mammifères sociaux (rat, singe) ne se justifient pas car les outils génétiques nécessaires pour disséquer les mécanismes sous-jacents sont peu nombreux chez ces espèces. Les animaux seront utilisés à l’âge adulte (> 8 semaines) car leur cerveau est complètement développé et les circuits de la récompense sont arrivés à maturité.