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TA Lille, jugement n°2009244 du 25/03/2022 (Nicolas Marty c. DDPP62)

Les rapports d’inspection sont communicables en y occultant le nom des personnes physiques et sans y occulter les non-conformités. Les craintes de sécurité ne sont pas caractérisées.

Vu la procédure suivante :

Par un jugement n°2009244 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille, sur la requête de M. Nicolas Marty tendant à l’annulation de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui communiquer le dernier rapport d’inspection de chacun des établissements d’expérimentation animale du département, a procédé avant dire droit à un supplément d’instruction tendant à la production par le préfet du Pas-de-Calais, dans un délai d’un mois à compter de la date de notification de ce jugement et sans que la communication de ces pièces soit donnée à M. Marty, du dernier rapport d’inspection de chacun des établissements d’expérimentation animale du département, sans aucune occultation et sous pli confidentiel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code des relations entre le public et l’administration ; – le code rural et de la pêche maritime ;
– le décret n° 2009-1484 du 3 décembre 2009 relatif aux directions départementales interministérielles ;
– le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. xxx en application de l’article R. 222-13 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique du 11 mars 2022 : – le rapport de M. xxx, magistrat désigné,
– et les conclusions de M. xxx, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 30 décembre 2021, le tribunal a procédé avant dire droit à un supplément d’instruction tendant à la production par le préfet du Pas-de-Calais, dans un délai d’un mois à compter de la date de notification de ce jugement et sans que la communication de ces pièces soit donnée à M. Marty, du dernier rapport d’inspection de chacun des établissements d’expérimentation animale du département, sans aucune occultation et sous pli confidentiel. Les documents ont été réceptionnés au tribunal le 21 janvier 2022.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Aux termes de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre. ». Aux termes de l’article L. 311-5 de ce code : « Ne sont pas communicables : (…) 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / (…) / d) A la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la sécurité des systèmes d’information des administrations ; / (…) ». Selon l’article L. 311-6 du même code : « Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière commerciale et industrielle ; / (…) /3° Faisant apparaître le comportement d’une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice (…) ». Enfin, l’article L. 311-7 de ce code dispose : « Lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L. 311-5 et L. 311-6 mais qu’il est possible d’occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions ».

3. D’une part, après avoir pris connaissance des rapports d’inspection non occultés transmis par la préfecture du Pas-de-Calais au tribunal sous pli confidentiel, il n’est nullement démontré que la communication des informations relatives aux non conformités relevées par l’inspecteur chargé de l’évaluation des établissements d’expérimentation animale aurait pour effet de révéler le comportement d’une personne alors que, dans les rapports communiqués à M. Marty en cours d’instance, ont été occultés à bon droit les noms des personnes physiques exerçant au sein de l’établissement ou associées à celui-ci. D’autre part, le préfet du Pas-de-Calais ne fait état d’aucune menace de manière suffisamment circonstanciée concernant ces établissements et aucun élément probant n’est versé au dossier de nature à en attester l’existence. Dans ces conditions, le préfet du Pas-de-Calais n’est pas fondé à refuser à M. Marty la communication des informations occultées, mis à part celles permettant l’identification d’une personne physique.

4. Il résulte de ce qui précède que M. Marty est fondé à demander l’annulation de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a implicitement confirmé son refus de lui communiquer les rapports d’inspection des établissements d’expérimentation animale situés dans le ressort du département.
Sur les conclusions aux fins d’injonction sous astreinte :

5. Aux termes de l’article L.911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure. ».

6. Eu égard au motif d’annulation retenu, l’exécution du présent jugement implique que les documents administratifs précités soient communiqués à M. Marty. Il y a lieu, par suite, d’enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui communiquer la copie du dernier rapport d’inspection pour chaque établissement pratiquant l’expérimentation animale, en occultant l’identité des personnes physiques pouvant y figurer, et ce, dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement. Il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.

D E C I D E :

Article 1er: La décision implicite par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a refusé de communiquer à M. Marty le dernier rapport d’inspection pour chaque établissement pratiquant l’expérimentation animale est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Pas-de-Calais de communiquer à M. Marty la copie du dernier rapport d’inspection pour chaque établissement pratiquant l’expérimentation animale dans le département du Pas-de-Calais dans les conditions indiquées au point 6 du présent jugement.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Nicolas Marty et au ministre de l’intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2022.