Les rapports d’inspection sont communicables en y occultant le nom des personnes physiques et des établissements au titre de risques d’intrusions et de dégradations (notamment liés à des questions de biosécurité) qui ne seraient « pas sérieusement contestés ».
Vu la procédure suivante :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 5 janvier 2021, le 29 mars 2021 et le 30 mars 2021, M. Nicolas Marty demande au tribunal :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain sur sa demande de communication du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département ;
2°) d’enjoindre au directeur départemental de la protection des populations de l’Ain de lui communiquer le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département, sans occulter les noms des établissements, ni les dates d’inspection et de rapport, ni les intitulés de la grille d’inspection, ni les niveaux de non-conformité, ni des passages entiers de commentaires, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : – sa requête est recevable ;
– la décision attaquée n’est pas motivée ;
– le refus de communiquer les documents demandés méconnaît l’article 311-1 du code des relations entre le public et l’administration, alors que la commission d’accès aux documents administratifs a émis un avis favorable à leur communication.
Par deux mémoires en défense, enregistré le 25 mars 2021 et le 30 avril 2021, le préfet de l’Ain conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
– la requête est irrecevable car introduite le 5 janvier 2021, avant l’expiration du délai de deux mois, courant à compter du 1er décembre 2021, dont dispose l’administration pour répondre à la demande de communication, alors que c’est à cette dernière date seulement qu’elle a eu connaissance à la fois de la saisine de la commission d’accès aux documents administratifs et de l’avis de cette commission ;
– les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 29 septembre 2021 et présenté par M. Marty, n’a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l’article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code des relations entre le public et l’administration ; – le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. xxx, président de la 1ère chambre, en application de l’article R. 222-13 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. xxx, président,
– et les conclusions de Mme xxx, rapporteure publique, – et les observations de M. Marty.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier électronique du 7 mai 2020, M. Marty a demandé au directeur départemental de la protection des populations de l’Ain de lui communiquer le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département. Le 29 octobre 2020, la commission d’accès aux documents administratifs a rendu un avis favorable sous réserves à la communication des documents sollicités. Par la présente requête, M. Marty demande l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain sur sa demande de communication du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département et qu’il soit enjoint sous astreinte au même directeur de lui communiquer le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département, sans occulter les noms des établissements, ni les dates d’inspection et de rapport, ni les intitulés de la grille d’inspection, ni les niveaux de non-conformité, ni des passages entiers de commentaires.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l’Ain :
2. Aux termes de l’article R. 343-3 du code des relations entre le public et l’administration : « La commission notifie son avis à l’intéressé et à l’administration mise en cause, dans un délai d’un mois à compter de l’enregistrement de la demande au secrétariat. Cette administration informe la commission, dans le délai d’un mois qui suit la réception de cet avis, de la suite qu’elle entend donner à la demande. » Selon l’article R. 343-4 de ce code : « Le silence gardé pendant le délai prévu à l’article R. 343-5 par l’administration mise en cause vaut décision de refus. » L’article R. 343-5 du même code dispose : « Le délai au terme duquel intervient la décision implicite de refus mentionnée à l’article R. 343-4 est de deux mois à compter de l’enregistrement de la demande de l’intéressé par la commission. »
3. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l’avis rendu le 29 octobre 2020 par la commission d’accès aux documents administratifs sur la demande de M. Marty tendant à la communication par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département que la demande d’avis sur cette communication a été enregistrée le 27 juillet 2020 par la commission. Par suite, contrairement à ce que fait valoir le préfet de l’Ain, une décision implicite de rejet par l’administration de cette demande de communication était, en application des dispositions précitées de l’article R. 343-5 du code des relations entre le public et l’administration, née antérieurement à l’introduction de la présente requête, le 5 janvier 2021, quelles que soient les dates auxquelles l’administration a eu connaissance de la saisine de la commission d’accès aux documents administratifs et de l’avis de cette commission.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
4. En premier lieu, aux termes de l’article L. 311-14 du code des relations entre le public et l’administration : « Toute décision de refus d’accès aux documents administratifs est notifiée au demandeur sous la forme d’une décision écrite K4motivée comportant l’indication des voies et délais de recours. » Selon l’article L. 232-4 du même code : « Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n’est pas illégale du seul fait qu’elle n’est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l’intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu’à l’expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués. »
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait demandé la communication des motifs de la décision rejetant implicitement sa demande de communication des documents administratifs en litige avant l’expiration du délai de recours contentieux qui est intervenu, au plus tard, le 5 mars 2021. En s’abstenant de communiquer les motifs de cette décision, le préfet de l’Ain n’a, dès lors, pas méconnu l’article L. 232-4 du code des relations entre le public et l’administration.
6. En second lieu, aux termes de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre. » Selon l’article L. 311-5 du même code : « Ne sont pas communicables : / (…) / 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / (…) d) A la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la sécurité des systèmes d’information des administrations ; / (…) ». L’article L. 311-7 de ce code dispose : « Lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L. 311-5 et L. 311-6 mais qu’il est possible d’occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions. »
7. Il résulte des pièces du dossier, notamment des écritures du préfet de l’Ain qui ne sont pas sérieusement contestées sur ce point par le requérant, que les rapports d’inspections conduites au sein d’établissements menant des expérimentations animales, dont la communication est demandée par M. Marty, contiennent des informations sensibles relatives aux locaux, aux personnels, aux animaux qui y sont détenus, aux activités et procédures mises en œuvre, certains établissements manipulant des matériels sensibles au plan sanitaire ou traitant de virus potentiellement pathogènes. Dans ces conditions, la révélation d’informations permettant l’identification ou la localisation des personnes physiques ou morales pourrait faciliter la localisation de ces bâtiments ou installations et des intrusions malveillantes ou dégradations dans ces établissements et porter ainsi atteinte à la sécurité publique et à la sécurité des personnes par la dissémination dans l’environnement des agents pathogènes manipulés dans ces établissements d’expérimentations avec des conséquences sanitaires extrêmement graves et préjudiciables pour les populations humaines. Dès lors, et en application des dispositions précitées de articles L. 311-1, L. 311-5 et L. 311-7 du code des relations entre le public et l’administration, est communicable, avec occultation des mentions permettant l’identification ou la localisation des personnes physiques ou morales, le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans le département de l’Ain. Par suite, M. Marty est fondé à demander l’annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain sur sa demande de communication du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département.
Sur les conclusions à fin d’injonction sous astreinte :
8. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le présent jugement implique seulement que soit communiqué au requérant le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans le département de l’Ain, avec occultation des mentions permettant l’identification ou la localisation des personnes physiques ou morales. Il y a lieu d’enjoindre au préfet de l’Ain de communiquer ces documents à M. Marty dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction de l’astreinte demandée par la requérante.
DÉCIDE :
Article 1er : Est annulée la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain sur la demande de M. Marty de communication du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l’Ain de communiquer à M. Marty, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement, le dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans le département de l’Ain, avec occultation des mentions permettant l’identification ou la localisation des personnes physiques ou morales.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Marty est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Nicolas Marty et au ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Copie en sera adressée au préfet de l’Ain.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2021.
Vu la procédure suivante :
M. B A a demandé au tribunal administratif de Lyon, d’une part, d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la protection des populations de l’Ain sur sa demande de communication du dernier rapport d’inspection de chaque établissement d’expérimentation animale situé dans ce département et, d’autre part, de lui enjoindre, dans un délai de quinze jours et sous astreinte, de communiquer ce rapport sans occulter le nom des établissements, ni les dates d’inspection et de rapport, ni les intitulés de la grille d’inspection, ni les niveaux de non-conformité, ni des passages entiers de commentaires. Par un jugement n° 2100089 du 1er décembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire, enregistré le 4 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la demande de M. A.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Le premier alinéa de l’article R. 822-5 du code de justice administrative dispose que : » En cas de désistement avant l’admission du pourvoi, ou si le requérant est réputé s’être désisté en application de l’article R. 611-22, le président de la chambre donne acte du désistement par ordonnance « . Cette procédure ne nécessite ni instruction contradictoire préalable, ni audience publique.
2. Aux termes de l’article R. 611-22 du code de justice administrative : » Lorsque la requête ou le recours mentionne l’intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. / Si ce délai n’est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s’être désisté à la date d’expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d’Etat donne acte de ce désistement « .
3. Le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, dans son pourvoi sommaire, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 4 février 2022, a exprimé l’intention de produire un mémoire complémentaire. A la date de la présente ordonnance, le délai imparti par les dispositions précitées est expiré. Aucun mémoire complémentaire n’a été produit avant l’expiration de ce délai. Ainsi, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation doit être réputé s’être désisté de son pourvoi. Il y a lieu, par suite, de donner acte de ce désistement d’instance.
ORDONNE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement d’instance du ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Copie en sera adressée à M. B A.
Fait à Paris, le 30 juin 2022